sábado, 27 de diciembre de 2014

Himno a la Belleza (Charles Baudelaire)

¿Vienes del hondo cielo o del abismo sales,
Belleza? Tu mirar, infernal y divino,
vierte confusamente beneficios y crímenes,
por lo que se te puede comparar con el vino

Tus dos ojos contienen el poniente y la aurora;
esparces más perfumes que ocaso tormentoso.
Tus besos son un filtro y tu boca es una ánfora
que hacen cobarde al héroes y al niño valeroso.

¿Sales del negro abismo, o bajas de los astros?
Como un perro, el Destino sigue ciego tu falda...
Al Azar vas sembrando la dicha y los desastre,
y todo lo gobiernas sin responder de nada.

¡Caminas sobre muertos y te burlas, Belleza!
El Horror, de tus broches no es el menos precioso;
y el Crimen, que se cuenta entre tus caros dijes,
danza amorosamente en tu vientre orgulloso.

Deslumbrado, el insecto vuela hacia ti, candela.
Crepita,estalla y dice: "¡Bendigamos la antorcha!"
El amante, jadeando sobre su bella amada,
parece un moribundo que acaricia su fosa.

¿Qué importa así del cielo vengas o del infierno,
Belleza, monstruo enorme, ingenuo y atrevido,
si tu mirar, tu pie, tu faz me abren la puerta
de un infinito que amo y nunca he conocido?

Del Demonio o de Dios, ¿qué importa? 
Ángel, Sirena, ¿qué importa si me vuelves- 
hada de ojos sedantes,ritmo, perfume, 
luz, ¡oh tú, mi única reina!-
menos odioso el mundo, más cortos los instantes?

Poema en Francés:
Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,
O Beauté? ton regard, infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l'on peut pour cela te comparer au vin.

Tu contiens dans ton oeil le couchant et l'aurore;
Tu répands des parfums comme un soir orageux;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore
Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.

Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres?
Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien;
Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,
Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.

Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques;
De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant,
Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,
Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.

L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,
Crépite, flambe et dit: Bénissons ce flambeau!
L'amoureux pantelant incliné sur sa belle
A l'air d'un moribond caressant son tombeau.

Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,
O Beauté! monstre énorme, effrayant, ingénu!
Si ton oeil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte
D'un Infini que j'aime et n'ai jamais connu?

De Satan ou de Dieu, qu'importe? Ange ou Sirène,
Qu'importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine! -
L'univers moins hideux et les instants moins lourds?



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